Chronique
Aux yeux des managers européens, l'Allemagne semble être devenue un modèle en matière de compétitivité. C'est le résultat d'un sondage publié mercredi 2 janvier dans le quotidien économique allemand Handelsblatt : sur six pays européens (l'Allemagne, la France, l'Italie, la Suisse, l'Autriche et la Grande-Bretagne), la première économie de la zone euro obtient la meilleure note, avec la Suisse.
L'Allemagne tire cette excellente réputation d'un certain nombre d'évolutions. La politique de modération salariale appliquée depuis plusieurs années et les profondes réformes entreprises par Gerhard Schröder (SPD) lorsqu'il était chancelier ont permis de limiter la hausse du coût du travail et de rendre plus flexible le marché de l'emploi. La croissance est aussi au rendez-vous depuis 2006, et le chômage baisse de mois en mois. Autre indice de l'attractivité de l'économie outre-Rhin, un nombre croissant d'investisseurs étrangers y engagent des fonds. Une étude publiée en décembre par le Handelsblatt avait montré que les trente plus grandes entreprises allemandes sont désormais détenues en majorité par des étrangers.
Pour autant, "c'est une bêtise de mettre l'Allemagne et la Suisse sur le même plan en termes de compétitivité", fustige Alfred Steinherr, expert à l'Institut de recherches économiques de Berlin (DIW). Selon lui, d'autres études, qui reposent sur des critères objectifs, tels que le dépôt de brevets ou les procédures administratives, montrent que la première économie de la zone euro est loin d'être un modèle et continue d'afficher un coût du travail très élevé. En outre, les projets du gouvernement sur le salaire minimum ou le correctif apporté à certaines réformes incitent de nombreux experts à douter d'une nouvelle augmentation de la compétitivité à moyen terme.
Quant à "la différence faite entre la France et l'Allemagne, elle est très exagérée", poursuit l'économiste. Une étude publiée par l'Institut d'économie de Cologne (IW) en octobre 2007 montre d'ailleurs que l'Allemagne continue de devancer la France en matière de coût du travail dans l'industrie. "Il est difficile d'aller contre les clichés, les Allemands passeront toujours pour des gens performants et les Français pour des gens élégants", ironise M. Steinherr.
Cécile Calla (Berlin, correspondance)